Je
m’exprime ici à titre personnel, je ne représente ni le parti ni le
candidat.
Nous
tous, ici, sommes dans l’opposition ; enfin l’opposition d’aujourd’hui.
Si
notre approche de la gestion de l’environnement n’était pas différente
de celle des Verts et du PS, si notre discours ne se distinguait pas du
leur, nous n’aurions plus qu’à faire de la surenchère sur eux : "plus vert
que moi tu meurs" !
Et
quand le gouvernement donne 10.000 francs de prime à tout acheteur d’une
voiture électrique ou GPL, nous offririons 30.000 francs… C’est la course
à l’échalote, pardon à l’éolienne, au kilomètre carré de panneau
photovoltaïque…
Est-ce vraiment cela que nous voulons ?
Dans ces prestigieux
locaux du Conservatoire des Arts et Métiers, je serai heureux de me placer
sous le patronage intellectuel de cette vénérable institution, par exemple
à propos d’un numéro de la Revue des Deux-Mondes de novembre 1999 :
L'intolérance écologique, où s’exprimait sans détour Monsieur
Jean de Kervasdoué, professeur au CNAM, ancien directeur des Hôpitaux au
ministère de la Santé.
Je le cite :
"Le mouvement écologique a
réussi à diffuser des croyances et à imposer des réglementations sans
fondement.
Quand ces règlements ne
sont pas respectés, la presse s'en empare et vient nourrir de très
réelles inquiétudes. Et cela permet aux écologistes de mettre en exergue
des "déviances" qu'ils ont eux-mêmes fabriquées.
Et l’auteur d’énumérer :
- les wagons
irradiés d’EDF, moins irradiants que le paysage breton ;
- la
pollution atmosphérique, moins néfaste que le pollen du printemps ;
- les traces
d'ozone dans l'atmosphère, une "pitrerie écologique", disait le Professeur
Derenne."
Fin
de citation.
Nous
l’avions vérifié nous aussi : c’est assez exact, beaucoup de seuils de
polluants ne sont pas justifiés, ils sont trop bas. Et, pire encore,
tout le monde le sait, à commencer par le Comité de la Prévention et
de la Précaution du MATE… Même chose au niveau Europe et mondial.
Le
décor de mon propos est ainsi planté, vous voyez où je veux en venir :
nous aussi, libéraux, nous voulons une vraie défense de
l’environnement, tout aussi sincèrement et fermement que les autres. Mais
nos moyens pour y parvenir seront différents.
En
France, traditionnellement, nous voulons que l’Etat gère
l’environnement, à la suite d’analyses subtiles et intelligentes, bien
connues depuis longtemps : le marché ne prendrait pas en compte :
- les biens non appropriés,
- ni le très long terme,
- ni les facteurs qui ne rentrent pas dans le calcul
économique…
Souvenez-vous
de ces analyses finement articulées sur "la fonction publique garante de
la durée au-delà des foucades du politique", illustrées par exemple à
merveille à propos de l’énergie nucléaire : le grand bénéfice de la
continuité de notre détermination étatique, à gauche comme à droite,
aurait fait le "succès" de notre programme électronucléaire national -
entre guillemets, le mot succès.
Et
ceci, ô paradoxe, en occultant, par un bizarre aveuglement, l’absence
de débat public sur le sujet, alors que précisément le débat, général
et ouvert, constitue en principe le grand bénéfice de l’intervention
étatique, publique.
Sur
l’énergie nucléaire, quand on dit "l’Etat", eh bien, ce n’est pas le
Parlement, ni même le Gouvernement : c’est une poignée de hauts
fonctionnaires - technocrates, évidemment - bien à l’abri dans leur tour
d’ivoire, protégés des embardées du suffrage universel…
Et
nous voyons en Allemagne que s’il s’agit de l’Etat acteur et décideur
au sens véritablement politique cette fois, ce n’est guère meilleur en
la matière, avec l’inopérant stop and go qui se prépare sur leur
nucléaire, si la CDU-CSU revient aux affaires, comme il est probable…
Les
erreurs de l’Etat :
Elles sont immenses, nombreuses, bien connues… Leurs causes, aussi, sont
connues.
L’aide nucléaire française à l’Irak dans les années 60 ou les
accords avec l’Iran en 74 autour d’Eurodif, sont probablement les pires de
toutes…
Les
7.500 tués annuels sur nos routes, aussi, même si c’est moins mal que les
11.000 d’il y a 15 ans…
Les
Français devraient apprendre à compter un peu plus souvent ! Les 80
milliards de francs donnés chaque année à la SNCF, les 100 milliards de
francs au bas mot, que coûte chaque année en trop le programme
électronucléaire… l’aide au logement, les HLM, les quartiers, le mauvais
contrôle de l’immigration, suite à l’abandon par l’Etat de ses tâches
régaliennes…
Réglementations mal fondées, inévitablement trop unifiantes par rapport à
un réel divers et mouvant…
Les
subventions publiques ! Des torrents d’argent, des Himalaya de finances,
jamais mesurés ni contrôlés. La Province envoie des montagnes d’euros à
l’Ile-de-France, via l’aide aux transports, qui les lui retourne
via l’aménagement du territoire ou via les célèbres
péréquations de tarifs publics… Et ces péréquations de tarifs publics sur
l’électricité des sites à l’écart, elles bloquent le développement des
énergies renouvelables, qu’il faut alors subventionner à leur tour, dans
l’autre sens…
Vous
imaginez les coûts administratifs, derrière ? Tout cela ne serait que
ridicule, s’il n’en résultait pas appauvrissement, chômage et insécurité.
Quels seront nos principes ? eh bien… l’inverse !
Le bon acteur, c’est la
société civile, ce n’est pas l’Etat (ni l’Union européenne, ni les
régions, même s’il faut faire l’Europe intégrée et s’il faut faire une
vraie décentralisation). Appliquons enfin le vrai principe de
subsidiarité, qui dit que tout commence à la personne humaine, et
qu’on ne monte dans l’échelle des institutions que si c’est vraiment
indispensable.
"Pollueur payeur", bravo ! voila un super principe libéral, à base de
responsabilité. Mais le pollueur, c’est quelqu’un qui pollue, pas
quelqu’un qui dépasse un seuil réglementaire.
Action rapide et efficace devant les Tribunaux (Tribunaux remis en état
de marche, l’Etat se concentrant sur ses tâches régaliennes, facilement,
car il se sortira du champ économique et social, où il consomme
aujourd’hui toutes ses ressources et tous ses efforts…). Et la
jurisprudence jouera le même rôle que la réglementation, mais bien adaptée
aux vrais problèmes.
Prenons en compte le calcul économique : ratifier le protocole de Kyoto,
c’est très bien, mais : combien çà coûte ? Question peu posée,
réponse peu entendue : 200 milliards d’euros, pour l’Europe, chaque année…
Est-ce bien raisonnable, dans le très grand degré d’incertitude
scientifique qui entoure cette difficile question ?
Il
faut se convaincre que toute dépense mal justifiée, c’est grave :
cela ralentit le progrès économique, donc le progrès social, industriel,
scientifique, et y compris le progrès de l’environnement.
Du
concret, adapté aux vrais problèmes.
C’est
extrêmement simple au total : sauf pour quelques cas exceptionnels, la
société civile traitera bien les problèmes de l’Environnement.
Et
l’Etat, concentré sur ses fonctions régaliennes, gérera bien ses
vraies priorités, lui aussi.
Vais-je vous surprendre ? Les libéraux sont pour le renforcement du
rôle de l’Etat, sur ses vraies responsabilités.
Terminons sur une image bucolique : à chacun son métier, et les vaches
seront bien gardées !
Dominique GARRIGUES
Animateur du
Groupe de travail Environnement de Démocratie Libérale

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